Changer d’allure à la voix, c’est facile
 
Les chevaux obéissent très volontiers à la voix, pour peu qu’on leur prenne le temps de leur en expliquer le sens : une éducation particulièrement adaptée à la pratique de l’extérieur.
 En manège, le but du cavalier, c’est surtout d’apprendre à contrôler son corps, pour améliorer ses aides et peaufiner son équitation. Mais une fois dehors, les priorités changent : c’est d’abord le cheval qu’il faut contrôler, parce qu’il n’y a plus de murs pour l’encadrer, parce que la vie est précieuse et les camions fréquents. Peu importent en fait les aides utilisées, mains, pieds, dents, voix ou gestes, pourvu qu’elles assurent au couple confort et sécurité...
Or si on y prend le temps d’y réfléchir, on s’aperçoit que les aides tactiles traditionnelles présentent en extérieur une énorme quantité d’inconvénients, dont on a souvent du mal à s’apercevoir, tant l’usage en est ancré...
D’abord, les rênes s’opposent à la liberté de balancier du cheval, l’empêchant de scruter son environnement, et lui donnant une impression d’enfermement qui l’insécurise. Ensuite, à l’autre bout, le cavalier a bien autre chose à faire de ses mains : il lui faut repousser les branches basses, pointer l’itinéraire sur la carte, se retourner pour vérifier ses poursuivants ou son mulet de bât...  S’il tient ses rênes de trop près pendant ses diverses activités, la bouche et le moral de sa monture risquent d’en prendre un coup. Face à ces incompréhensibles actions de rênes, mais aussi de jambes et d’assiette, le cheval hésitera sur les réponses à fournir... “  Est-ce que mon cavalier me demande quelque chose, ou pas ? ” Dans le doute, il finit par s’abstenir de répondre, ou même par s’affoler.
 
 Pour ramener un peu de compréhension et de sérénité dans le couple, la recette est vieille comme le monde : la parole !
Puisque le langage tactile n’a plus la précision, la douceur et la rigueur nécessaire, la voix peut sauver la communication dans le couple, et devenir l’aide n°1 pour l’extérieur : douce, indolore, efficace, elle plaît incroyablement aux chevaux, qui ne se font pas prier pour l’adopter.
 
Mais encore faut-il en bien comprendre le fonctionnement. Car très souvent, la voix est mal utilisée et apparaît plus comme une manie ridicule que comme un véritable outil. Si c’est pour répéter “ au pas, au pas, au pas ” sur tous les tons à une jument qui trottine gaiement sans se laisser abattre, ça ne sert à rien. Si c’est pour faire résonner le petit bois d’injonctions modératrices  (“ là, arrête, ho, ho !) dans le vain espoir de calmer un poulain excité qui danse et surchauffe, ça n’en vaut pas la peine. Et si l’ordre “ galop ” ne donne un résultat qu’une fois les deux jambes enfoncées dans les flancs de l’animal, c’est que décidément la voix ne marche pas... Il ne faut pas confondre parler et  travailler à la voix. Trop de cavaliers considèrent la voix comme un petit plus, qu’ils rajoutent aux autres aides sans les remplacer, pour vidanger leurs états d’âme ou se sécuriser.
Dans ces conditions, leur monture n’apprend pas à donner de réponses précises à des ordres précis.  Elle s’habitue simplement à ce flot de paroles  incompréhensibles : trop de bla-bla, ça n’intéresse pas.
 
Pour mener l’éducation vocale à bien, il faut comprendre que pour le cheval, la voix c’est du chinois ! Inutile de répéter les mots en criant de plus en plus fort ; la seule manière de leur donner un sens, c’est de les “ traduire ”. Et ensuite, même s’il commence à en saisir le sens, il n’est pas obligé d’obéir. C’est au cavalier d’expliquer, puis de motiver la réponse. Sans répéter, sans crier...
Pratiques et faciles à vérifier, les indications d’allures constituent un bon point de départ. À condition bien sûr, de ne pas essayer “ galope ” avec un trotteur juste réformé, ou “ arrête ” avec un fébrile, du moins les premiers temps... Préférer une transition aisée pour commencer : pas/trot, ou trot/galop par exemple... Une fois l’ordre vocal défini, choisir une portion d’itinéraire qui permette de refaire cette transition un grand nombre de fois. Il ne reste qu’à pratiquer avec patience la bonne vieille technique de  l’escalade :
 
1.   Indication vocale, prononcée une seule fois, sur un ton neutre, et distinctement.
 
2.   Si le cheval n’a pas répondu au bout d’une seconde, intervention des aides tactiles, qui “ traduisent ” l’ordre vocal et provoquent l’allure.
Le délai entre ces deux interventions constitue la clé de la réussite. Il faut vraiment laisser une seconde de délai au cheval pour répondre à l’ordre vocal. Si les aides interviennent trop tôt, elles vont se confondre avec la voix, qui ne pourra jamais prendre effet à elle seule. Mais si elles arrivent trop tard, le lien de cause à effet risque de se perdre, ou la réponse de manquer d’empressement.
Pour obtenir des résultats dès la première séance, la recette est simple : il faut multiplier les essais. Une série de dix, un bon temps de repos, une autre série, etc.
On veillera cependant à faire ses demandes à intervalles variés, sinon, l’élève pourrait se mécaniser, en remarquant qu’on lui demande un départ au trot toutes les 20 secondes, et en oubliant de s’intéresser à l’indication vocale. La séquence donne bien sûr tout autant d’occasions de pratiquer la transition inverse (trot/pas, ou galop/pas) : on peut en profiter pour enseigner le signal vocal correspondant, si l’on arrive à penser à tout, ce qui n’est pas forcément évident au début !
Étonnamment, cette procédure doit rester la même pendant toute la carrière du cheval. Jamais le cavalier ne donnera une indication vocale sans se tenir mentalement prêt à en imposer l’exécution dans la seconde qui suit. Bien sûr, le cheval éduqué va répondre à la voix 9 fois sur 10. Mais lorsqu’il se fait un peu prier ou qu’il n’en tient pas compte, il faut s’en apercevoir et réagir, sinon, le dressage à la voix va très vite régresser.
On ne doit en aucun cas prononcer une indication d’allure si l’on est pas prêt à la faire appliquer, ou pas capable de l’imposer. Une règle simple mais qui comporte ses contraintes :
- Ne pas insérer les indications d’allures connues dans la conversation : ne pas dire “ On trotte après le pont ? ”  ou “ Arrête de zigzaguer ! ” si le cheval connaît “ trotte ” ou  “ arrête ”...
- Ne pas donner une indication d’allure impossible à faire appliquer. Dire “ au pas ” à sa monture alors que le groupe la dépasse dans un nuage vrombissant. Ni lui intimer “ galop ” alors qu’elle commence à déployer les aérofreins à la vue d’un tas de bois bâché.
- Aller au bout de ses demandes : si l’on a dit “ arrête ”, ne pas se contenter d’un retour au pas. Il fallait réfléchir avant !
 
Une fois les transitions de base acquises, on peut profiter des facilités offertes par la voix pour faire étudier au cheval des transitions plus difficiles, qui développeront son équilibre et son attention : arrêt/trot, pas/galop, trot/arrêt... Ou travailler sur le maintien de l’allure dans les franchissements : enjamber un fossé “ au pas ”, sauter un tronc avec réception au “ trot ”... Plus on lui en demande, plus il en donnera…
 

Apprenez-lui à tenir ses allures
 
Pour rendre son cheval d’extérieur sûr et responsable, il faut lui donner des responsabilités ! Le respect de l’allure imposée constitue un contrat de base, très facile à mettre en œuvre.
 
 De nos jours, les meilleures voitures sont celles qui font tout le boulot : direction assistée, suspensions actives, freinage ABS, détecteur anti-collisions… Mais que d’années de recherches et que d’investissements il a fallu pour en arriver à ces options… Nous autres cavaliers pouvons bénéficier depuis des millénaires de ces perfectionnements. Et pour pas cher !
Certes, elle ne nous encourage guère sur cette voie, l’équitation actuelle qui nous enseigne à encadrer constamment le cheval dans un entrecroisement d’aides : mains ajustées, jambes serrées, assiette active. Aucune initiative ne lui est laissée, aucune responsabilité. Il devient une petite machine à pédales, à manettes et à boutons. Petite machine dans laquelle le cerveau n’a rien à faire...
 
Ainsi conçue, l’équitation présente un triple danger. Enserré dans les aides, la monture perd le libre usage de son balancier, ce qui se révèle effrayant pour un animal de fuite qu’on promène dans une campagne pleine de tracteurs rugissants, de fourbes faisans et de bouts de plastique. Comme son esprit n’est mobilisé par aucune tâche, elle a tout son temps pour s’alarmer de son enfermement, repérer des détails louches, chercher les failles du contrôle exercé par son cavalier – sait-on jamais, s’il fallait s’enfuir ! De son côté, l’homme ne peut compter que sur son habileté, puisqu’il exerce un contrôle purement physique, et non mental : si ses rênes lui échappent, malheur à lui !
 
Il est rare que le cavalier prenne conscience des implications psychologiques de cet interventionnisme des aides. En revanche, il en remarquera probablement les inconvénients physiques, pour peu que ses balades se prolongent au-delà d’une ou deux heures. En effet, on ne peut indéfiniment faire agir les aides tactiles sans ressentir divers tracas : fatigue, crampes, bobos, courbatures. S’il a bien énergiquement poussé ou retenu sa monture pendant toute une longue journée de rando, d’endurance ou de TREC, le cavalier risque de se sentir un peu raide et moulu, le soir, au coin du feu… Est-ce tellement la peine de se faire transporter, si c’est pour finir plus fatigué qu’à pied ?
A de rares exceptions près, les chevaux se répartissent en 2 catégories : ceux qui voudraient aller plus vite, et qui tirent, arrachent les rênes, trottinent ou bondissent ; ceux qui voudraient aller moins vite, et qui vous laissent entretenir le mouvement, ralentissant dès que vous cessez de les stimuler. Ce comportement peut résulter du tempérament du cheval, ou des effets de l’environnement : fatigue du voyage, excitation du groupe, ou attrait du retour. Parfois, le profil varie selon l’allure : un marcheur mollasson devient énergique au trot, ou un excité au pas s’assagit aux allures supérieures. Mais dans tous les cas, lièvre ou tortue, c’est vous le vrai responsable. Si votre monture laisse son allure s’éteindre ou s’emballer, c’est parce que vous ne lui avez donné aucun contrat, laissé aucune responsabilité à ce sujet. Vous comptiez jusqu’ici sur les aides pour moduler la vitesse… Faites donc un peu appel au cerveau, la différence vous surprendra.
 
 Respect de l’allure, mode d’emploi
 
Peu importent l’âge du cheval ou ses expériences passées. Vous allez lui mettre en main un marché si simple et si avantageux qu’il mettra quelque minutes pour s’y intéresser, et quelques demi-heures pour l’adopter définitivement. Voici les termes du contrat : vous cessez toute action (même discrète) des aides : rênes en belles guirlandes arrondies, jambes décollées du poil, assiette neutre et relaxée. En échange de ce confort, vous allez réclamer à votre partenaire une petite chose toute simple : tenir l’allure. Plus tard, bien sûr, quand il saura appliquer cet accord, vous pourrez être plus précis encore, et lui apprendre à tenir un rythme :  trot moyen, petit galop, pas rapide, trot allongé, etc. Mais pas trop d’amibition pour le moment : occupons-nous d’abord de “ caler ” les allures.
 
Pour commencer, surtout si vous montez un “ lièvre ”, choisissez un cadre le plus sécurisant possible. Par exemple, vous pouvez commencer les leçons en carrière ou en manège, ou vous faire accompagner par un sage maître d’école, ou attendre le milieu de séance, afin que votre monture soit bien détendue. Ne faites pas comme ces cavaliers imprévoyants qui “ se baladent ” quand tout va bien, et ne cherchent des solutions qu’une fois leur cheval à moitié embarqué… Autant mettre le règlement en place quand les circonstances facilitent les choses, puis faire monter doucement le niveau de difficulté.
 
Une fois le cadre choisi, il ne vous reste qu’à installer le cheval dans l’allure de votre choix : relâchez alors complètement et immédiatement toutes vos aides… mais pas votre attention ! Votre mission consiste désormais à surveiller l’allure comme du lait sur le feu. Vous allez sûrement voir la “ faute ” arriver de très loin, mais n’intervenez pas tant que l’allure n’a pas changé. Pour que votre monture apprenne à se prendre en charge, il lui faut une limite facile à identifier. La rupture d’allure en est une : attendez-la. On est parfois étonné de s’apercevoir que ce mollasson qui semblait toujours à deux doigts de reprendre le trot, du temps où l’on poussait le galop à chaque foulée, parvient à tenir l’allure alors qu’on le laisse faire tout seul !
 
Chaque erreur est éducative
 
Forcément, au début, des erreurs se produiront. C’est logique. Le cheval  ne sait pas encore qu’il y a un règlement. Il lui faut le temps de le comprendre, de l’accepter, puis d’en faire un réflexe. L’apprentissage sera d’autant plus rapide que vous serez attentif et efficace. Si vous laissez trottiner 5 foulées avant de ramener le pas, si vous laissez trotter 10 mètres avant de rétablir le galop, attendez-vous à une application imprécise de votre règlement. Ce sera important pour l’animal  si c’est important pour vous !
 
Quand l’allure aura commencé à se stabiliser, que les fautes “ directes ” seront devenues rares, n’hésitez pas à lancer de petits défis à votre monture, pour consolider sa formation. Abordez un accident de terrain, petite pente, léger creux, sans agir du tout sur les aides ; une petite indication vocale de rappel est la seule intervention possible. Forcément, la première fois, un changement d’allure se produira, et vous interviendrez pour rétablir l’allure. Recommencez tranquillement, jusqu’à ce que votre partenaire réussisse à tenir volontairement l’allure demandée. Félicitez chaudement, récompensez, en n’hésitant pas à mettre pied à terre sur le champ.
Ce genre de petit défi calera de mieux en mieux chaque allure, permettant des “ paris ” de plus en plus difficiles : saut d’un fossé, d’un obstacle, dépassement par un congénère…
 
 
Fuite en avant
Certaines montures donnent toujours l’impression de vouloir accélérer. On a tort de croire que c’est de la générosité, de l’excitation, qu’elles en veulent… C’est bien souvent une réaction contre l’omniprésence de la main : tandis que le cavalier freine presque en continu, le cheval ne cesse de pousser contre cette main qui le “ bride ”. Cercle vicieux. Monté sur des rênes en guirlandes, il retrouvera le calme qui semblait impossible.  Paradoxalement, on le contrôlera donc mieux en cessant de le tenir !
 
Mesures d’économie
 
Plus une aide est utilisée fréquemment, plus elle s’use : le cheval s’y habitue et réagit de moins en moins. Pour éviter ce problème, le cavalier doit constamment se surveiller, pour vérifier qu’il n’entretient pas l’allure par des jambes actives, un bassin qui pousse, une voix qui stimule. C’est souvent difficile de changer ces habitudes, devenues de véritables réflexes : au début, il faudra de gros efforts de volonté et de concentration pour desserrer les aides, ne serait-ce que quelques secondes, le naturel revenant au galop !
 
L’intervention d’une aide doit être rare, et produire une réponse visible. Sinon, il faut aussitôt (et dans la seconde qui suit) non pas répéter mais  renforcer cette aide pour faire réagir.  Ainsi, la prochaine fois, le cheval  y fera attention. Utilisée dans ce cadre strict, la cravache se révèle un bon outil.
 
 
Maitriser les coins

« Des coins mal maitrisés vous compliquent la réalisation de la figure à la sortie. Le coin peut quasiment être une aide préparatoire, un moyen de vérifier que le cheval est prêt pour la figure suivante. »

 
Exercice :
  • En vous servant de deux des coins de la carrière et de deux barres, installez une « mini » carrière à une extrémité, l’idée étant de disposer de quatre coins très rapprochés. Pour commencer, disposez vos « nouveaux coins » à une vingtaines de mètres des vrais.
  • Prenez l’allure où vous avez le moins de mal a rassembler votre cheval, pas, trot ou galop. Commencez par passez les vrais coins, puis les deux autres, comme si c’étais des vrais.
  • Vos virages doivent êtres abrupts, presque des quarts de pirouette si vous êtes au galop, ou avec les épaules nettement chassées d la piste si vous êtes au trot.
  • Entrainez-vous à vraiment contrôler les postérieurs et les antérieurs de votre cheval dans les coins.
  • Répétez aux deux mains.
 
Si votre cheval reste droit, en flexion et qu’il se porte de lui-même, alors il est dans l’équilibre. Servez-vous du coin pour voir si il répond bien à vos aides et si vous êtes parfaitement au contrôle. Vous devez pouvoir rendre la main après le coin avec un cheval qui garde la même allure active, se portant de lui-même sans tomber sur les épaules. Si c’est le cas, vous pouvez êtes satisfait de votre coin ; vous avez bien maintenu votre cheval dans l’équilibre.
 
Important :
Le but, c’est de rassembler et de garder l’activité des postérieurs, ils doivent suivre exactement la même trace que celle des antérieurs, sans les jeter vers l’extérieur ou les ramener vers l’intérieur dans le coin. Entretenez le rythme, le cheval se portant toujours de lui-même. Plus le coin est bien réalisé, mieux vous préparerez la figure suivante.
Ne vous contentez pas de le laissez tourner quand l’envie lui en prend.
 
Cet exercice est plus utile au trot, mais plus facile au pas et au galop car le rassembler est alors réellement possible. Généralement, si le cheval n’a pas un grand niveau, le rythme du galop facilite le rassembler, alors que le trot ralenti souvent excessivement voir le cheval repasse quasiment au pas.
 
 



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